Une nouvelle ère pour le programme RS&DE du Québec :

Activités et dépenses admissibles élargies

Dans son budget de 2025, le Québec a annoncé une restructuration complète de ses incitatifs fiscaux pour la recherche et le développement (R&D), y compris les crédits d’impôt provinciaux pour la recherche scientifique et le développement expérimental (RS&DE). Conçues pour simplifier et moderniser le système, les mesures annoncées visent à réduire le fardeau administratif des entreprises, à éliminer les crédits peu utilisés et à améliorer l’efficacité des incitatifs en réorientant le financement vers les domaines où il apportera le plus de valeur — essentiellement, la province espère faire plus avec moins. De plus, le Québec a également élargi la portée des activités et des dépenses admissibles aux crédits d’impôt, ce qui augmente considérablement le soutien financier disponible pour les projets admissibles.

Réforme majeure

Parmi les principaux changements annoncés pour les années d’imposition débutant après le 25 mars 2025, le Québec a éliminé plusieurs crédits d’impôt existants et en a regroupé d’autres dans un nouveau crédit d’impôt pour la recherche, l’innovation et la commercialisation (CRIC).

La province a également simplifié la structure des taux du crédit d’impôt et l’a rendue plus inclusive, en offrant un crédit d’impôt remboursable de 30 % sur le premier million de dollars de dépenses admissibles (au-delà du seuil d’exclusion) à toutes les sociétés auquel s’ajoute un crédit remboursable de 20 % pour les dépenses admissibles supplémentaires. De plus, le seuil d’exclusion correspond désormais au plus élevé entre 50 000 $ ou le montant personnel de base pour chaque employé (par exemple, 18 751 $ en 2025) travaillant sur des projets de R&D admissibles, au prorata du temps consacré par l’employé aux activités R&D admissibles.

Cependant, le changement le plus significatif du programme de RS&DE du Québec est l’élargissement de l’admissibilité aux crédits d’impôt pour inclure les activités de précommercialisation et le coût d’acquisition d’équipements. Pour une discussion plus approfondie sur les autres aspects des changements annoncés et leur impact potentiel sur les entreprises, veuillez consulter l’article de Ryan intitulé « Quebec’s SR&ED Tax Credit Overhaul: A Simpler, Stronger Incentive ».

Élargissement des activités admissibles

Bien que la définition de la R&D demeure essentiellement la même dans le cadre du CRIC, un changement important est l’inclusion des activités de précommercialisation parmi les activités admissibles. Auparavant, les entreprises ne pouvaient réclamer que les dépenses liées aux activités de R&D jusqu’au moment de la résolution d’une incertitude technologique. Désormais, les dépenses peuvent être réclamées pour certaines activités réalisées après ce point, notamment les essais, les validations technologiques et les études visant à satisfaire aux exigences réglementaires, ainsi que certaines activités de développement de prototypes et d’usines pilotes.

Essais, validations et études : Les sociétés peuvent désormais réclamer des dépenses liées aux essais, à la validation ou à l’étude d’un produit ou d’un procédé en vue de sa commercialisation et de l’obtention d’une certification ou d’une approbation réglementaire. Par exemple, une entreprise dans le domaine de l’énergie propre développant une nouvelle technologie de panneaux solaires peut désormais inclure dans sa demande au CRIC les dépenses liées aux essais bêta requis pour obtenir une approbation réglementaire pour une utilisation dans les bâtiments résidentiels.

Développement de prototypes : Les dépenses liées au développement et aux essais de prototypes pour en vérifier la fonctionnalité et la performance afin de s’assurer que le produit final répondra aux exigences réglementaires et du marché sont désormais admissibles au crédit d’impôt. Par exemple, un fabricant d’équipements médicaux peut inclure dans sa demande au CRIC les dépenses liées aux essais de résistance de prototypes d’appareils afin de garantir que le produit final obtiendra une approbation réglementaire pour une utilisation chez les patients.

Usines pilotes : Les entreprises peuvent inclure les dépenses liées aux essais ou à la validation des procédés de production d’une usine pilote afin de s’assurer que la technologie respecte les normes de qualité et les exigences réglementaires. Par exemple, dans le cadre du CRIC, une entreprise de biotechnologie peut désormais inclure dans sa demande les dépenses liées aux essais de production pilote dans un nouveau procédé de fabrication pharmaceutique afin de s’assurer qu’il produit des résultats cohérents et attendus.

Dans tous les cas, les activités de précommercialisation doivent constituer une continuation des activités R&D admissibles réalisées au Québec pour être admissibles au CRIC. De plus, l’admissibilité élargie ne s’applique qu’aux activités réalisées au cours des années d’imposition débutant après le 25 mars 2025.

En outre, les activités liées à la conception de produits, qui étaient auparavant admissibles à un volet distinct du crédit d’impôt pour la conception, sont désormais admissibles au CRIC. (Le volet « mode » du crédit précédent demeure inchangé.)

Dépenses en capital désormais admissibles

Dans une mesure importante — et quelque peu controversée — le Québec permet désormais que les biens en capital (c’est-à-dire les biens amortissables) soient inclus comme dépenses admissibles dans le cadre du CRIC. Ce changement devrait avoir une portée considérable, avec de nombreuses dépenses auparavant non admissibles qui deviennent maintenant admissibles au crédit d’impôt. Toutefois, certaines limites s’appliquent : les terrains, les immeubles et les équipements usagés sont exclus du CRIC. Néanmoins, ce changement de politique devrait bénéficier aux entreprises qui investissent massivement dans les infrastructures de R&D. Par exemple, les développeurs de logiciels réalisant des activités de R&D admissibles peuvent désormais inclure le coût des serveurs et autres composants technologiques dans leur demande au CRIC.

Avantage principal

La nouvelle approche du Québec reconnaît que les entreprises ne passent généralement pas directement au marché une fois qu’un projet de R&D est terminé. De nombreux coûts supplémentaires sont engagés pendant la phase de précommercialisation d’un projet. Bien qu’un financement provincial direct puisse être disponible pour subventionner ces coûts, ainsi que les dépenses de marketing et de vente lors de la mise en marché d’un nouveau produit ou procédé ou de l’exploration d’un marché d’exportation, l’accès à ces programmes est limité — et le financement n’est pas garanti.

En élargissant l’admissibilité au CRIC pour inclure une plus grande part du coût total de l’innovation, le Québec a créé un incitatif plus complet et équitable pour promouvoir l’investissement en R&D dans la province. En effet, existe-t-il un autre État, province ou territoire en Amérique du Nord qui offre un crédit d’impôt remboursable de 20 % à 30 % pour la R&D, incluant les dépenses de précommercialisation ?

Principaux défis

Bien que l’élargissement des activités et des dépenses admissibles offre aux entreprises la possibilité d’obtenir des crédits d’impôt plus importants, compensant les coûts associés à l’investissement en R&D et réduisant les risques, le programme révisé présente également plusieurs défis.

Les contribuables et les vérificateurs pourraient avoir de la difficulté à justifier l’utilisation admissible des biens en capital dans les projets de R&D étant donné que la vérification pourrait avoir lieu jusqu’à trois ans plus tard (période de vérification prévue par la loi). De plus, il existe une incertitude quant à savoir si le niveau actuel d’expertise technique au sein du gouvernement provincial sera suffisant pour résoudre les différends potentiels concernant la mesure dans laquelle les biens en capital à long terme ont été utilisés dans des activités admissibles.

De même, des désaccords pourraient survenir lors des vérifications quant à la mesure dans laquelle les salaires et traitements des employés auparavant exclus des demandes de crédit d’impôt peuvent désormais être inclus comme dépenses admissibles. À cet égard, l’ajout de certaines activités de précommercialisation aux dépenses admissibles devrait élargir considérablement la portée des salaires d’employés considérés dans le calcul du CRIC.

Naturellement, toute entreprise s’appuyant sur les anciennes règles court le risque de passer à côté de dépenses admissibles et de l’occasion d’obtenir un crédit d’impôt plus élevé, en particulier lorsqu’il s’agit de biens en capital et d’activités de précommercialisation. Il est prévu que la province publie des directives supplémentaires à ce sujet, puisque le lien avec la R&D admissible devient généralement plus faible à mesure qu’un nouveau produit ou procédé approche de sa viabilité commerciale.

Les entreprises devront faire preuve de diligence dans l’examen de leurs activités de R&D afin de s’assurer que toutes les dépenses admissibles sont prises en compte. De plus, l’impact potentiel de l’inclusion de nouvelles dépenses admissibles au CRIC sur d’autres programmes d’incitatifs, tels que les subventions gouvernementales et les crédits d’impôt pour les technologies propres, devra également être pris en compte afin d’optimiser le soutien financier d’une organisation.